Aurier
annonçait plusieurs romans, Les
Manigances, La
Bête qui ment : comme
toujours, et comme tous les faiseurs de projets, il se préoccupa de
réaliser ses promesses dans l'ordre inverse où il les avait faites.
On a retrouvé dans ses papiers un manuscrit intitulé Edwige,
mais qu'il avait verbalement débaptisé quelques semaines avant sa
mort; nous le publions sous ce titre : Ailleurs.
C'est plus qu'une esquisse et moins qu'une œuvre achevée, mais, tel
quel, ce petit roman philosophique me semble d'une importance
évidente. La fantaisie et l'ironie s'y dressent en des proportions
d'épopée : c'est un duel tragi-comique entre la Science et la
Poésie, entre l'Idéalité et le Positivisme, conté en un style
adéquat au sujet, tantôt bizarrement familier, tantôt mesuré et
constellé de belles métaphores.
Ailleurs
est encore fort remarquable par les tendances nouvelles et purement
idéalistes de l’œuvre. On sent que les chapitres de comédie, qui
alternent avec les chapitres de rêve, ne sont là que comme
nécessaires repoussoirs, afin de démontrer l'infamie de la réalité
et la magnificence du rêve, — et la stupidité de la Science,
quand son outrecuidance veut expliquer tout et donner la clef de
tout, régenter tout.
Rémy
de Gourmont, Notice
aux Œuvres posthumes de Gabriel Albert-Aurier - éditions du Mercure de France, Paris, 1893.
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