Plus vif que le guépard, et plus endurant, il passe comme un éclair de feu. Nul animal n'est plus rapide que le lièvre diatonique (ou lièvre à soufflet). L'œil humain est incapable de l'apercevoir. C'est seulement grâce à des caméras de très haute précision que nous sommes parvenus à étudier ses mouvements, observer son aspect.
Observons-le donc. Tout d'abord, il se distingue par son corps en accordéon, lequel produit des sons à chaque bond, dans tous les demi-tons de la gamme. Si nous ne le voyons pas, nous pouvons donc l'entendre. Sa chasse est réglementée, mais au lieu de le tirer à vue, on le tire à l'ouïe. Comme vous vous en doutez, le résultat est assez improbable, à tel point que l'animal inquiète les autorités, à cause de sa prolifération.
En position d'étirement, le lièvre diatonique atteint parfois plus de deux mètres ; en phase de repli, son corps peut se contracter jusqu'à mesurer quelques centimètres (autour de quarante, en général). Ce phénomène de "ressort" est captivant, car il constitue un ingénieux système thermorégulateur. Et on peut se dire une fois encore que la nature est bien faite : des simulations récentes nous confirment le rôle essentiel de ce "climatiseur organique", sans lequel l'animal imploserait à coup sûr, tant sa vitesse est fulgurante.
Au printemps, lors de l'accouplement, le lièvre diatonique ralentit à peine sa course et doit donc se livrer à des exercices périlleux. A cette période de l'année, la campagne est assaillie de fréquences sonores d'une rare intensité. Un grand nombre de mélomanes accourent des quatre coins du monde pour écouter le concert de ces animaux virtuoses et tonitruants, qui mêlent les pires dissonances aux accords les plus harmonieux.
Extrait de Zazoo - bestiaire fabuleux, Rémy Leboissetier
(Venus d'ailleurs N°0, novembre 2006)