"Jamais, quand c’est la vie elle-même qui s’en va, on n’a
autant parlé de civilisation et de culture. Et il y a un étrange parallélisme
entre cet effondrement généralisé de la vie qui est à la base de la
démoralisation actuelle et le souci d’une culture qui n’a jamais coïncidé avec
la vie, et qui est faite pour régenter la vie.
Avant d’en revenir à la culture je considère que le monde a
faim, et qu’il ne se soucie pas de la culture ; et que c’est
artificiellement que l’on veut ramener vers la culture des pensées qui ne sont
tournées que vers la faim.
Le plus urgent ne me paraît pas tant de défendre une culture
dont l’existence n’a jamais sauvé un homme du souci de mieux vivre et d’avoir
faim, que d’extraire de ce que l’on appelle la culture, des idées dont la force
vivante est identique à celle de la faim.
Nous avons surtout besoin de vivre et de croire à ce qui
nous fait vivre et que quelque chose nous fait vivre, — et ce qui sort du
dedans mystérieux de nous-mêmes dans un souci grossièrement digestif.
Artaud en 1947 |
Si le signe de l’époque est la confusion, je vois à la base
de cette confusion une rupture entre les choses, et les paroles, et les idées,
les signes qui en sont la représentation."
Antonin Artaud
Extrait de la préface du Théâtre et son double
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