Fils du
dieu dynastique Amon et de Mout, le dieu-lune Khonsou faisait partie de l’une des
plus importantes triades honorée à Thèbes. Son nom dérive d’un verbe qui
exprime la notion de déplacement : il est "celui qui traverse"
et décrit le mouvement de la lune dans le ciel. Ainsi, Khonsou était qualifié
de "Voyageur".
Les
premières mentions du dieu-lune font de lui un dieu violent qui "abat les
seigneurs et leur coupe le cou" pour les vider de "ce qui est à
l’intérieur de leur corps" (Textes
des Pyramides). Au Moyen Empire, une autre formule des Sarcophages insiste sur le caractère dangereux de Khonsou, "dont on doit se protéger", car il est "celui qui envoie le
courroux, celui qui enflamme les cœurs", comme il l’affirme lui-même.
Khonsou se
manifeste sous des aspects différents, montrant diverses facettes de son
pouvoir, selon les multiples épithètes qui lui sont accolées : neferhotep, dont le nom souligne la
clémence, pa-ir-sekherou, "celui qui accomplit les desseins" ou "celui qui fixe le
sort", épithètes qui induisent également des considérations
hiérarchiques, le premier étant reconnu comme le "grand", le second
comme le "petit Khonsou". Une troisième désignation, oun-nekhenou, le personnifiant comme "celui qui est éternellement jeune". D’autres inscriptions le nomment
tour à tour "l’enfant", le "sauveur" ou "l’emmailloté" et diverses formes syncrétiques le lient par
exemple à Thot, Iâh, Rê ou Chou.
En tant
que dieu lunaire, Khonsou peut assumer la plupart des fonctions de Thot, en
particulier celle de comptable du temps et de dispensateur de la durée de
vie ; il est aussi juge, vizir et magicien.
Le temple de Khonsou (Karnak) offre un
panorama presque complet de l’iconographie du dieu thébain : comme un
homme hiéracocéphale (divinité anthropomorphe ou, plus rarement, d’un sphinx à
tête de faucon), coiffé du disque et du croissant lunaires ornés d’un grand uræus (image du cobra prêt à l’attaque),
il peut prendre aussi l’aspect d’un dieu-enfant momiforme, assis sur un trône
et tenant un sceptre composite ; couronné du même emblème lunaire, il
porte alors la tresse de l’enfance, un diadème royal et un collier rituel (menat), mais aussi celle de Khonsou-Thot
qui peut être hiéracocéphale ou ibiocéphale (à tête d’ibis) ; le même
Khonsou-Thot peut encore apparaître sous les traits d’un petit enfant suçant
son doigt ou ceux d’un babouin tenant un œil-oudjat (l’œil fardé égyptien, symbole de plénitude physique).
Figure
majeure du panthéon égyptien, que les Grecs identifièrent à Hermès, Thot est le
plus important des dieux lunaires. Magicien, il a la chance de se dédoubler, voire se multiplier : s’il
personnifie l’astre, il en est aussi le gardien, le protecteur, éventuellement aussi l’adversaire. Dieu-ibis,
vénéré jusqu’en Nubie, il fut surtout le seigneur d’Hermopolis, cité située près du delta du Nil.
Thot
se serait-il autofécondé ? D’après les Textes
des Pyramides, il n’a pas de mère. Il est cependant formellement identifié
à la lune, succédant à Rê pour dispenser la lumière, coiffé du croissant, dont la courbe évoque celle du bec de l’ibis, et du disque de la
pleine lune.
La lune était assimilée à l’œil d’Horus : les mutilations d'Horus symbolisaient sa phase
décroissante tandis que le remplissage de l’œil correspondait à sa phase croissante et au remembrement d'Horus (remplissage équivalant à la plénitude dont on parle plus haut sous le terme d’œil-oudjat).
Thot,
le savant par excellence, est d’abord un calculateur habile, maître du calcul
du temps et de ses divisions en années, mois, jours, heures et minutes, mais
également "celui-qui-compte-le-temps-de-vie". Porteur du destin
individuel des hommes, il fut le "seigneur du calame et des paroles divines",
le maître des écrits, de la force créatrice et la manifestation même du verbe
créateur.
Redoutable
magicien, le dieu-lune est aussi un dieu de l’ordre et de la mesure, assume un
rôle important dans la fondation des temples, architecte et maçon à l’occasion
avec Sechat, (reconnue comme la déesse de l’écriture, protectrice des
bibliothèques). Greffier divin (il enregistre le résultat de la pesée du cœur
du défunt), il jour aussi le rôle de médiateur dans le conflit qui oppose Horus
à son oncle Seth. Il prescrit, il parlemente et réglemente…
L’aura
de mystère entourant l’œuvre de Thot (dont le conte démotique de Satni évoque
l’existence) est celle qui baignera la philosophie hermétique lorsque le dieu "trois fois grand" sera devenu Hermès Trismégiste.
Quelle
que soit l’époque, les représentations de Thot se limitent en général à trois
types : le plus souvent, il est figuré comme un homme ibiocéphale ou
d’aspect entièrement zoomorphe, sous la forme d’un ibis ou d’un babouin assis.
Les entités syncrétiques qui voient Thot se fondre avec Iâh ou Khonsou mêlent
les éléments iconographiques appartenant à l’un ou l’autre dieu.
texte adapté de : L'Egypte ancienne et ses dieux - dictionnaire illustré, Jean-Pierre Corteggiani éditions Fayard, 2007
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