La symbolique, pas plus que les croyances populaires, ne font de différence entre le lièvre et le lapin. Pour certaines civilisations anciennes, le lièvre était un « animal de la lune » car les taches sombres que l’on peut voir sur le disque lunaire ressemblent à un lièvre en pleine course.

Encyclopédie des symboles (sous la direction de Michel Cazenave, La Pochothèque,1996)


auteur-éditeur : www.remy-leboissetier.fr

lundi 29 octobre 2012

Khonsou et Thot [Égypte]

Khonsou le voyageur

Fils du dieu dynastique Amon et de Mout, le dieu-lune Khonsou faisait partie de l’une des plus importantes triades honorée à Thèbes. Son nom dérive d’un verbe qui exprime la notion de déplacement : il est "celui qui traverse" et décrit le mouvement de la lune dans le ciel. Ainsi, Khonsou était qualifié de "Voyageur".

Les premières mentions du dieu-lune font de lui un dieu violent qui "abat les seigneurs et leur coupe le cou" pour les vider de "ce qui est à l’intérieur de leur corps" (Textes des Pyramides). Au Moyen Empire, une autre formule des Sarcophages insiste sur le caractère dangereux de Khonsou, "dont on doit se protéger", car il est "celui qui envoie le courroux, celui qui enflamme les cœurs", comme il l’affirme lui-même.

Khonsou se manifeste sous des aspects différents, montrant diverses facettes de son pouvoir, selon les multiples épithètes qui lui sont accolées : neferhotep, dont le nom souligne la clémence, pa-ir-sekherou, "celui qui accomplit les desseins" ou "celui qui fixe le sort", épithètes qui induisent également des considérations hiérarchiques, le premier étant reconnu comme le "grand", le second comme le "petit Khonsou". Une troisième désignation, oun-nekhenou, le personnifiant comme "celui qui est éternellement jeune". D’autres inscriptions le nomment tour à tour "l’enfant", le "sauveur" ou "l’emmailloté" et diverses formes syncrétiques le lient par exemple à Thot, Iâh, Rê ou Chou.

En tant que dieu lunaire, Khonsou peut assumer la plupart des fonctions de Thot, en particulier celle de comptable du temps et de dispensateur de la durée de vie ; il est aussi juge, vizir et magicien.
Le temple de Khonsou (Karnak) offre un panorama presque complet de l’iconographie du dieu thébain : comme un homme hiéracocéphale (divinité anthropomorphe ou, plus rarement, d’un sphinx à tête de faucon), coiffé du disque et du croissant lunaires ornés d’un grand uræus (image du cobra prêt à l’attaque), il peut prendre aussi l’aspect d’un dieu-enfant momiforme, assis sur un trône et tenant un sceptre composite ; couronné du même emblème lunaire, il porte alors la tresse de l’enfance, un diadème royal et un collier rituel (menat), mais aussi celle de Khonsou-Thot qui peut être hiéracocéphale ou ibiocéphale (à tête d’ibis) ; le même Khonsou-Thot peut encore apparaître sous les traits d’un petit enfant suçant son doigt ou ceux d’un babouin tenant un œil-oudjat (l’œil fardé égyptien, symbole de plénitude physique).

Thot le scribe

Figure majeure du panthéon égyptien, que les Grecs identifièrent à Hermès, Thot est le plus important des dieux lunaires. Magicien, il a la chance de se dédoubler, voire se multiplier : s’il personnifie l’astre, il en est aussi le gardien, le protecteur, éventuellement aussi l’adversaire. Dieu-ibis, vénéré jusqu’en Nubie, il fut surtout le seigneur d’Hermopolis, cité située près du delta du Nil.
Thot se serait-il autofécondé ? D’après les Textes des Pyramides, il n’a pas de mère. Il est cependant formellement identifié à la lune, succédant à Rê pour dispenser la lumière, coiffé du croissant, dont la courbe évoque celle du bec de l’ibis, et du disque de la pleine lune.
La lune était assimilée à l’œil d’Horus : les mutilations d'Horus symbolisaient sa phase décroissante tandis que le remplissage de l’œil correspondait à sa phase croissante et au remembrement d'Horus (remplissage équivalant à la plénitude dont on parle plus haut sous le terme d’œil-oudjat).


Iâh-Thot ibiocéphale couronné du disque et du croissant lunaires recevant la pleine
lune sous la forme de l’œil-oudjat que lui tend un babouin qualifié de seigneur
de l’éternité (d’après une stèle du musée de Turin)
 
Thot, le savant par excellence, est d’abord un calculateur habile, maître du calcul du temps et de ses divisions en années, mois, jours, heures et minutes, mais également "celui-qui-compte-le-temps-de-vie". Porteur du destin individuel des hommes, il fut le "seigneur du calame et des paroles divines", le maître des écrits, de la force créatrice et la manifestation même du verbe créateur.


Redoutable magicien, le dieu-lune est aussi un dieu de l’ordre et de la mesure, assume un rôle important dans la fondation des temples, architecte et maçon à l’occasion avec Sechat, (reconnue comme la déesse de l’écriture, protectrice des bibliothèques). Greffier divin (il enregistre le résultat de la pesée du cœur du défunt), il jour aussi le rôle de médiateur dans le conflit qui oppose Horus à son oncle Seth. Il prescrit, il parlemente et réglemente…
L’aura de mystère entourant l’œuvre de Thot (dont le conte démotique de Satni évoque l’existence) est celle qui baignera la philosophie hermétique lorsque le dieu "trois fois grand" sera devenu Hermès Trismégiste.
Quelle que soit l’époque, les représentations de Thot se limitent en général à trois types : le plus souvent, il est figuré comme un homme ibiocéphale ou d’aspect entièrement zoomorphe, sous la forme d’un ibis ou d’un babouin assis. Les entités syncrétiques qui voient Thot se fondre avec Iâh ou Khonsou mêlent les éléments iconographiques appartenant à l’un ou l’autre dieu.

texte adapté de : L'Egypte ancienne et ses dieux - dictionnaire illustré, Jean-Pierre Corteggiani éditions Fayard, 2007

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