La symbolique, pas plus que les croyances populaires, ne font de différence entre le lièvre et le lapin. Pour certaines civilisations anciennes, le lièvre était un « animal de la lune » car les taches sombres que l’on peut voir sur le disque lunaire ressemblent à un lièvre en pleine course.

Encyclopédie des symboles (sous la direction de Michel Cazenave, La Pochothèque,1996)


auteur-éditeur : www.remy-leboissetier.fr

jeudi 25 septembre 2014

Erik Satie, Percussions Claviers de Lyon [BNL112972, 2013]

Après le tribut des mandolines du Melonious Quartet, voilà un nouvel ensemble de transcriptions d’œuvres du compositeur Erik Satie qui a eu pour effet de dresser spontanément les oreilles de votre lièvre précieux. Erik Satie continuant à être si peu joué en public (tout au moins en France) par les représentants de la musique dite "sérieuse", il convient de saluer l'initiative d'artistes moins sérieux, qui en perpétuent l'esprit fantasque, ascétique et méditatif, féroce et moqueur.

Ce qui n'a rien de simple, malgré les apparences, comme le confirme Raphaël Aggéry dans le texte d'intention qui présente cette re-création : « Les œuvres de Satie ont la singularité d'être majoritairement écrites pour piano et certaines sont d'une déconcertante simplicité pianistique ! Comment, dès lors, les adapter pour cinq musiciens ? Les transcriptions que j'ai réalisées dans le passé étaient toutes tirées d’œuvres orchestrales et « réduites » pour notre quintette. A l'inverse, j'ai été confronté ici à cette écriture très épurée. Un travail conséquent d'orchestration, d'instrumentation, d'amplification et quelquefois de composition a donc été nécessaire pour donner un nouvel éclairage à ces magnifiques pages musicales, sans jamais altérer le caractère originel de la musique. »

Le programme débute avec les incontournables Gymnopédies (1888) et Gnossiennes (1890), et c'est la première des merveilles que d'entendre ces sonorités aériennes qui nous emportent très haut dans les sphères (la troisième Gnossienne est particulièrement somptueuse par la qualité de son orchestration et son arrangement, qui nous fait très bien sentir l'influence de Satie sur certaines musiques répétitives, notamment celle de l'américain Steve Reich).
L'humeur malicieuse du compositeur pointe ensuite son nez dans les trois pièces des Airs à faire fuir (1897), la majorité des arrangements se concentrant sur la période dite "humoristique" de Satie. Nous continuons ainsi, dans une voie chronologique et fantaisiste, avec les 3 Véritables préludes flasques (pour un chien) de 1911 et un ensemble de pièces écrites en 1913 : Descriptions automatiques, toujours conçues par 3, incluant des citations de chansons populaires et enfantines, pièces faussement légères, imprégnées de mélancolie ; 7 pièces extraites du Piège de Méduse, la seule comédie lyrique en 1 acte écrite par Satie, d'une bizarrerie cruelle (que Michel Sanouillet estimait appartenir à la « préhistoire du mouvement Dada » et qui annonce aussi le théâtre de l'absurde de Ionesco).
Croquis et Agaceries d'un gros bonhomme en bois et Embryons desséchés (toujours portées par le chiffre 3) qui sont incontestablement des modèles de perfection funambulesque, de fausse désinvolture et suprême dérision - à pleurer de rire dans la grande pompe des finales...

 
Le plat de résistance, ce sont bien entendu les miniatures drolatiques de Sports et divertissements (1914), introduites ici par la voix de Bardassar Ohanian, où Satie nous offre une série de tableaux musicaux très expressifs (à voir et à entendre, donc, en portant si possible un œil au graphismes des partitions de Satie).
Après cet ensemble plus enjoué se placent les Cinq grimaces pour le songe d'une nuit d'été (1915), d'après l'orchestration de Darius Milhaud, et tout ce beau travail se termine par la fameuse Sonatine bureaucratique (1917).
Que dire d'autre ? Que ce disque, qui n'est pas seulement à conseiller aux amoureux de Satie, présente un généreux programme d'une durée de 75 minutes et qu'il a été enregistré en juin 2012 par les musiciens du Quintette de Percussions Claviers de Lyon, qui comprend : Sylvie Aubelle, YingYu Chang, Jérémy Daillet, Gilles Dumoulin et Gérard Lecointe.