Paul Bourgoignie (photo Etienne Lecomte) |
Ce
personnage discret […] est peut-être le moins cité des surréalistes belges.
…/…
Si l'on
retrouve son nom au bas de l'un ou l'autre manifeste et dans quelques numéros
de revues, sa bibliographie est peu abondante, ses apparitions rares et sa
parole quelque peu voilée.
…/…
En dehors
de quoi, Paul Bourgoignie paraît être, comme plusieurs autres auteurs, un cas
assez significatif de fidélité et d'éclectisme conjugués. Sans qu'il cesse
d'affirmer très clairement son appartenance au groupe surréaliste, en effet, on
trouvera son nom - et bien davantage : sa participation active – dans diverses
composantes de la «Belgique Sauvage», appellation inventée en 1971 par la revue
Phantomas. Ainsi Bourgoignie participera-t-il très régulièrement aux
activités de Phantomas (au point d'en être sacré « type en or »
en 1969), au Daily Bul et à diverses publications.
Joseph Noiret, dans son texte publié dans La Belgique sauvage, cite Paul Bourgoignie à plusieurs reprises : d’abord, comme faisant partie, dès 1947, du surréalisme-révolutionnaire en Belgique, puis du mouvement COBRA, formé fin 1948 et qui se dissoudra volontairement en 1951. En dehors de son activité poétique, Paul Bourgoignie était architecte, mais exerça sa profession de dessinateur au service des autres.
Joseph Noiret, dans son texte publié dans La Belgique sauvage, cite Paul Bourgoignie à plusieurs reprises : d’abord, comme faisant partie, dès 1947, du surréalisme-révolutionnaire en Belgique, puis du mouvement COBRA, formé fin 1948 et qui se dissoudra volontairement en 1951. En dehors de son activité poétique, Paul Bourgoignie était architecte, mais exerça sa profession de dessinateur au service des autres.
…/…
Une part
importante des textes de Paul Bourgoignie antérieurs à 1979 a été reprise dans La
brouette aux longs-courts ; ainsi y retrouve-t-on, moyennant quelques mises
au point, la quasi-intégralité de Moroses Mots Roses (1968), de Lettres
en jeux / Jeux de l'être (1969), et des Lettres de mon moulin /Exercice
des lettres pour petites polices (1971) et de nombreux textes publiés en
revue.
La
brouette aux longs-courts reprend aussi bien des proses poétiques (dans une ligne assez semblable
à celle de Marcel Lecomte) que des poèmes strictement surréalistes, des pseudo-aphorismes,
des jeux de mots, des notations qui tiennent de la page de journal, des notes
de lecture, des textes théoriques, etc.
On
complètera la connaissance de Paul Bourgoignie par l'article sur Les Lèvres
Nues (dans La Belgique Sauvage). Ce texte paraît particulièrement
important pour situer et comprendre la trajectoire qui a été évoquée au début
de cet article. Bourgoignie y écrit notamment : «L'expérience surréaliste en
Belgique s'est servie de publications multiples ; il y eut des revues, des tracts
et des livres. S'il est possible d'en dégager des caractères qui les ramènent à
des traits fondamentaux communs, cela dépendra moins d'une relativement courte
période où il y eut un groupe constitué se concertant que d'un attachement à la
rigueur accordée aux relations entre pensée et action de la part de leurs
animateurs ».
Une autre clé, plus énigmatique et plus intime à la fois, se trouve dans un long texte, sous forme de lettre à Théodore Koenig, datée du 6 décembre 1968, repris dans La brouette aux longs-courts après avoir été publié dans le numéro 94-98 de Phantomas. Sous le titre «Parlez-moi de vos lectures», Bourgoignie produit un pêle-mêle littéraire où se retrouvent à la fois Amenophis, le Daily-Bul, les Mémoires d'Hadrien, Mariën, Broodthaers, Sade, l'Almanach du Père Sirius, le journal Spirou, Marivaux, l'Abbé de Choisy, la princesse Palatine, San Antonio, G.H. Hall (un auteur policier publié par le Fleuve Noir), E.V. Cunningham, etc. Étonnante coupe de la mémoire !
Une autre clé, plus énigmatique et plus intime à la fois, se trouve dans un long texte, sous forme de lettre à Théodore Koenig, datée du 6 décembre 1968, repris dans La brouette aux longs-courts après avoir été publié dans le numéro 94-98 de Phantomas. Sous le titre «Parlez-moi de vos lectures», Bourgoignie produit un pêle-mêle littéraire où se retrouvent à la fois Amenophis, le Daily-Bul, les Mémoires d'Hadrien, Mariën, Broodthaers, Sade, l'Almanach du Père Sirius, le journal Spirou, Marivaux, l'Abbé de Choisy, la princesse Palatine, San Antonio, G.H. Hall (un auteur policier publié par le Fleuve Noir), E.V. Cunningham, etc. Étonnante coupe de la mémoire !
Ne lisons-nous pas tous autant que
nous sommes, ce que nous indiquent des amis lorsque leurs goûts, ou quelques
côtés particulièrement fins de leur personnalité ont fait que nous y soyons
attentifs ou intéressés ? Cela va souvent plus loin que la simple curiosité. Le
titre d'un livre suggéré par l'un ou l'autre de ces amis-là, plus que retenu,
nous aura mis l'eau à la bouche. Nougé, Scutenaire, Lecomte et d'autres m'ont
fait rencontrer des auteurs dont nulle revue ne parle plus, qui m'ont ravi.
Nougé,
Lecomte, Scutenaire : ces trois aînés, figures essentielles du surréalisme
bruxellois, ont contribué à former la sensibilité de Paul Bourgoignie - et sans
doute, une certaine raréfaction de l'air qu'il s'est toujours plu à respirer ;
pour parler vite, on pourrait dire qu'on retrouve chez Bourgoignie la rigueur
hautaine de Nougé, la minutie bouleversée de Lecomte et la dérision fulgurante
de Scutenaire.
Aucune
bibliographie systématique ne semble avoir été faite de l'œuvre de Paul
Bourgoignie ; on en est réduit, ainsi, à consulter ses propres collections et
souvenirs.
Il reste à parcourir une œuvre dont la partie la mieux émergée se retrouve dans La brouette aux longs-courts […] Quelques textes en prose, d'abord, où s'inscrit, depuis les Illuminations, une des meilleures parts de la sensibilité contemporaine. En Belgique, Marcel Lecomte y a excellé, marquant de son influence le mouvement surréaliste tout entier, et bien au-delà. Le ton particulier qu'y apporte Bourgoignie est celui d'une sentimentalité extrême tempérée par la dérision -le coup de pied que se donne immanquablement Charlie Chaplin - et l'attention portée aux détails les plus intimes de la vie quotidienne.
Les poèmes de Paul Bourgoignie s'inscrivent bien évidemment dans la perspective du «beau comme» de Lautréamont, ou de la fameuse définition de Breton : « Le surréalisme repose sur la croyance à la réalité supérieure de certaines formes d'associations négligées jusqu'à lui, à la toute puissance du rêve, au jeu désintéressé de la pensée». Il serait sans doute abusif de lier les poèmes de Bourgoignie à une écriture automatique qu'à vrai dire le surréalisme a moins pratiquée qu'il ne le prétend, et dont Breton a bien montré les limites (Du surréalisme en ses œuvres vives, 1953) ; et d'ailleurs, on ne saurait assez méditer la recommandation de Nougé :
Il reste à parcourir une œuvre dont la partie la mieux émergée se retrouve dans La brouette aux longs-courts […] Quelques textes en prose, d'abord, où s'inscrit, depuis les Illuminations, une des meilleures parts de la sensibilité contemporaine. En Belgique, Marcel Lecomte y a excellé, marquant de son influence le mouvement surréaliste tout entier, et bien au-delà. Le ton particulier qu'y apporte Bourgoignie est celui d'une sentimentalité extrême tempérée par la dérision -le coup de pied que se donne immanquablement Charlie Chaplin - et l'attention portée aux détails les plus intimes de la vie quotidienne.
Les poèmes de Paul Bourgoignie s'inscrivent bien évidemment dans la perspective du «beau comme» de Lautréamont, ou de la fameuse définition de Breton : « Le surréalisme repose sur la croyance à la réalité supérieure de certaines formes d'associations négligées jusqu'à lui, à la toute puissance du rêve, au jeu désintéressé de la pensée». Il serait sans doute abusif de lier les poèmes de Bourgoignie à une écriture automatique qu'à vrai dire le surréalisme a moins pratiquée qu'il ne le prétend, et dont Breton a bien montré les limites (Du surréalisme en ses œuvres vives, 1953) ; et d'ailleurs, on ne saurait assez méditer la recommandation de Nougé :
« Exégètes,
pour y voir clair, rayez le mot surréalisme ».
(Histoire
de ne pas rire, Bruxelles, Les Lèvres nues, 1956)
il revient aux Galapagos.
un vieux complice.
-:-:-:-:-
Un carnet de maladresses.
Extraits du
texte de Pierre Puttemans, Paul
Bourgoignie, le surréalisme, le Daily Bul et Phantomas
publié dans
l’excellente revue Textyles - N°8, Surréalismes
en Belgique
Portrait du poète Paul Bourgoignie par René Magritte |
Il est
à noter que Paul Bourgoignie apparaît, sous les traits de Sigmund Freud, dans
le film de Marcel Marïen L'Imitation du cinéma, dont
Tom Gutt est l'acteur principal, farce érotico-freudienne contre l'Église, qui
provoqua lors de sa projection le 15 mars 1960 un scandale suivi le 17 d'une
plainte déposée au parquet de Bruxelles. Le film sera encore projeté à Liège, à
Anvers dans une salle des fêtes et à Paris au Musée de l'Homme puis, la demande
d'autorisation repoussée, interdit en France en février 1961.
À la fin de son texte, Pierre Puttemans écrit que « la part la plus singulière des œuvres de Paul Bourgoignie est constituée de jeux de mots graphiques ou auditifs - débusquages de sens et de contresens dans la langue, aiguisés par la dérision ». En voilà quelques exemples :
À la fin de son texte, Pierre Puttemans écrit que « la part la plus singulière des œuvres de Paul Bourgoignie est constituée de jeux de mots graphiques ou auditifs - débusquages de sens et de contresens dans la langue, aiguisés par la dérision ». En voilà quelques exemples :
D’un abécédaire à un crabe dédié
Cellier rose de la sorcellerie
Boulevardier
Au bordel ivre
Anagrammes, Lettres de mon moulin
Mieux vaut
un compromis
que deux comprimés.
un compromis
que deux comprimés.
-:-:-:-:-
Chassez
le naturelil revient aux Galapagos.
-:-:-:-:-
Un laveur de vitres en costume à carreaux.
-:-:-:-:-
Tout ridé commeun vieux complice.
-:-:-:-:-
La loi du
clerc obscur.-:-:-:-:-
Un carnet de maladresses.
Courtes pointes II, Chapeaux forts
et châteaux formes
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire
Si vous souhaitez adresser quelques carottes au LL ou au contraire, lui donner un coup de bâton sur le râble, ce formulaire vous est dans les deux cas destiné :