La symbolique, pas plus que les croyances populaires, ne font de différence entre le lièvre et le lapin. Pour certaines civilisations anciennes, le lièvre était un « animal de la lune » car les taches sombres que l’on peut voir sur le disque lunaire ressemblent à un lièvre en pleine course.

Encyclopédie des symboles (sous la direction de Michel Cazenave, La Pochothèque,1996)


auteur-éditeur : www.remy-leboissetier.fr

dimanche 5 mai 2013

Malcolm de Chazal, Sens-plastique [éditions Gallimard, 1948]

Né en 1902 à Vacoas (île Maurice), dans une famille franco-mauricienne d'origine forézienne, Malcolm de Chazal n'a quitté son île natale que pour acquérir une formation d'ingénieur à l'université de Baton Rouge, en Louisiane. Entre 1940 et 1945, il publie sept volumes de Pensées dans lesquels il trouve peu à peu le ton fulgurant propre à la révélation prophétique. Adressés à de nombreux intellectuels et artistes européens, ces volumes séduisent particulièrement Dubuffet, Jean Paulhan, Francis Ponge, André Breton. Célébré comme un génie à l'état brut, comme un météore poétique surgi des antipodes, Chazal peut faire éditer chez Gallimard les aphorismes surprenants de Sens plastique (1947) et les textes plus discursifs de La Vie filtrée (1949). Les lecteurs d'alors sont fascinés par la méthode poétique de Chazal : une pratique obstinée de la métaphore et de la synesthésie, une systématique de l'analogie qui vise à mettre au jour un système universel de correspondances, à démontrer un processus d'hominisation générale de la nature. Cette poétique, qui tient à la fois de la tradition occultiste et des illuminations des devinettes créoles (les sirandanes), s'épanouit en une théorie de la connaissance fondée sur le refus de tout dualisme et sur ce « sens magique » qu'est l'intuition de l'analogie universelle. Replié sur son île, où il fait figure d'excentrique, Malcolm de Chazal continue d'écrire et de publier quantités d'ouvrages de toutes sortes (chroniques, théâtre, pensées) jusqu'à sa mort en 1981.

Jean-Louis Joubert
(extrait de l'article de l'Encyclopédie Universalis)

 
Il faudrait un soleil dans l’œil pour voir le noir absolu, et une lune absolue pour voir le blanc total.

Les rares jours où Phœbé a le dessus sur Phœbus, ce dominateur intraitable, et où Phœbé force ce dernier à lui céder la place, voient au couchant le soleil furibond fuir sous l’œil narquois de la lune.

Le blanc de l’œil dans la pénombre est le plus beau des clairs de lune.

La lune est l'absolu du contre-jour. Qui trop fixe le soleil finit par « voir » une nuit blanche.

La lune a des mains d'ivoire et des bras d'argent, dont les bouts de doigts égouttent de la nacre. La coulée lunaire est un flot qui s'épaissit et rutile à mesure qu'il s'approche du sol. Vue de la stratosphère, au milieu des flots de lune, la Terre paraîtrait telle une conque de lait nacré aux reluis d'argent.

On dit : « vivre sur la Terre ». Mais on dira : « vivre dans la Lune ». Cette antithèse s'appliquant à un même état de fait sur deux mondes également ronds, s'explique du fait que la vue conçoit cave toutes choses vues de près et met sa vue dans le lointain, comme une sébile où l'on dépose une obole. On inventorie les choses de près, on fouille les objets à distance, l’œil cherchant comme un point d'appui d'autant plus solide que le pont du regard doit franchir de vastes espaces. Le regard de l'homme est comme une vrille, la nuit, sur la voûte étoilée, perforant chaque étoile qui nous fixe.

Notre Terre est sans doute la « lune » de la Lune, comme la Lune est notre lune. Combien de gens nous voient tels que nous les voyons et que l'aveuglement du soleil de notre moi nous cache à nous-même, comme l'aveuglement du soleil durant le jour empêche la Terre de voir comment la voit la Lune, et comme l'aveuglement de la gloire nous empêche de voir ce que pense véritablement de nous le monde.

Un soleil brille dans la perle, et une lune s'y expose, mariant leurs rayons couplés en un feu unique, comme du cristal brillant dans de la nacre, ou comme du lait étincelant lançant des flammes d'argent. La perle est le seul lieu sur la surface des terres où soleil et lune se tiennent dans un même « ciel ». La perle est un soleil de nacre et une lune de cristal, sertis dans un bain de lait d'argent.



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